Depuis La Panne, au ralenti.
Rejoindre les côtes belges en train depuis Paris et ne plus quitter la Mer des yeux.
Le plus long tramway du monde, le tram du Littoral, le “Kusttram”, vous emmène depuis La Panne, à la frontière franco-belge, jusqu'à la frontière belgo-néerlandaise, à Knokke-Heist. 68 arrêts sur 67 kilomètres de littoral. 2 heures 20 minutes de bout en bout. 2,5 euros le ticket.
La ligne parcourt toute la côte belge en traversant les stations balnéaires les plus réputées comme les plus populaires de la Mer du Nord. Elle dessert aussi la citadine Ostende. Entre les dunes et la digue, on traverse, au ralenti, un plat pays enchanteur qui sent bon la friture et l’iode.
Longtemps, arpenter le pays de Jacques Brel était une idée tellement fixe sans cesse remise à plus tard. Pourtant, ce petit pays a beaucoup à offrir et chacun de nos séjours belges nous a enchantés. On y trouve une sorte de nonchalance non feinte qui semble calmer les âmes et les corps.
Des plages à perte de vue où la mer s’éloigne très loin, si loin qu’on a l’impression qu’elle peinera même à remonter. Des chars à voile qui s'élancent à toute vitesse. Des promenades infinies envahies de cuistax, ces petits véhicules à pédales de toutes les couleurs et de toutes les formes, incontournables des animations d’été le long de la côte belge. Des sortes de pédalos routiers dont le nom désigne désormais aussi les souvenirs d’enfance à la mer. On voit défiler toutes les races de chien possibles. Les plus petits d’entre eux sont promenés en poussette. Un spectacle dont personne ne semble s’étonner à part nous.
Mais la reine ultime de ce littoral belge c’est la cabine de plage en bois, déclinée dans une large palette de couleur et de taille. Désormais sagement alignées le long des digues, les premières cabines qui auraient vu le jour à Ostende, à l’initiative d’un britannique, étaient autrefois montées sur des roues pour les rapprocher de l’eau. On y stocke chaises longues, parasols et autres accessoires du parfait estivant. On se transmet ces petites maisonnettes de génération en génération et lorsque viennent les premiers jours de printemps, c’est en famille qu’on vient retaper son abri.
On trouve encore le long de la ligne de tramway, un paysage parfois lunaire, façonné par les vents où le gris de l’horizon se mêle au blond du sable. Et lorsque les nuages s’éloignent, le bleu du ciel donne à ces stations du nord, un goût d’été d’une étonnante simplicité. Les barres d’immeuble se dressent face à la mer comme des remparts de béton et de vitres. Les villes défilent les unes après les autres. Le film se répète sans nous lasser. D’apparence tout semble un peu se ressembler. Si certaines stations tirent visuellement leur épingle du jeu, comme Le Coq et ses maisons colorées, Middelkerke cachée au milieu des dunes, Ostende l’artistique, on découvre rapidement que chaque ville a sa propre énergie, sa propre vie de village, une identité bien à elle. Si bien que ceux qu’on rencontre, des habitués de la côte belge, flamands pour la plupart, choisissent finalement de revenir dans le même village chaque année.
On a aimé parcourir ces paysages sans s’inquiéter de devoir se garer. Regarder par la vitre depuis l’arrière du tram et partager notre trajet avec ses usagers habituels sans se sentir touriste parmi les touristes. Sans choisir par avance où s’arrêter. Se sentir libre de descendre à n’importe quel moment. Ne pas être contraint par un itinéraire. S’arrêter ici parce que les dunes nous appellent ou descendre là parce que nos estomacs le réclament. Prendre son temps. Découvrir le patrimoine belge au ralenti.
A La Panne, le studio Moto a installé directement sur la digue, aux pieds des dunes, un escalier géométrique, en équilibre dans l’air qui attire un nouveau public dans cette station balnéaire toute proche de Dunkerque. Le premier Roi des Belges débarqua ici en 1831 pour prendre possession de son royaume. Depuis, les villas Belle époque font de La Panne une retraite discrètement rêvée de la bourgeoisie belge.



A Oostduinkerke, on pêche la crevette à cheval depuis toujours. L’activité a même été ajoutée au Patrimoine culturel immatériel de l’UNESCO en 2013. Les filets sont attachés aux chevaux qui les tractent avec force, les sabots dans l’eau. Un jeu de force surprenant se noue entre le cheval et les vagues lorsque le pêcheur l’emmène un peu plus au large et que le cheval se retrouve immergé jusqu’aux flancs. Des démonstrations sont organisées chaque année d’avril à septembre lorsque la mer est la plus clémente. Touristes et locaux curieux se retrouvent alors sur des kilomètres de plage, au milieu des pêcheurs vêtus de leur tenue typique en nylon jaune, des chiens en grand nombre qui se jettent dans les flaques d’eau laissées là par la marée. Les enfants sont venus avec leurs seaux comme pour participer à l’effort collectif. Les quelques poissons égarés dans les filets sont rejetés à la mer. On prépare ensuite un grand barbecue sur la place du village où les crevettes grises sont vendues pour éponger les bières qui coulent à flot.
Après Nieuwpoort et juste avant Middelkerke, le tramway s’élance sur une grande ligne droite au milieu de laquelle un arrêt mène aux dunes (Westende Sint-Laureins) et à l’hôtel Bonk légèrement à l’abri du vent et du sable qui se soulève.
On a posé nos valises à Oostende, quasiment à mi-chemin entre la France et les Pays-Bas. Plus étendue et plus dynamique que ses voisines, la cité balnéaire a vu défiler de nombreux artistes. La ville est fière de rappeler à qui veut bien l’entendre qu’elle a été le fief du symboliste belge James Ensor et lieu de vacances de Marvin Gaye. Il y écrit son plus grand tube : Sexual Healing. L’art s’invite un peu partout à Ostende, y compris sur ses murs. La ville fait partie du projet artistique triennal démarré en 2003 qui expose une quarantaine d'œuvres d’art le long des 67 kilomètres de côte. L’ancienne poste, De Grote post, construction moderniste post seconde Guerre mondiale abrite désormais un centre culturel. Il accueille également le Cultuur Café pour une pause bien méritée. Le musée d’art moderne et contemporain, le Mu.Zee (actuellement fermé pour travaux), met en avant des grands noms de l’art belge.
Depuis Ostende, on peut pousser à pied jusqu’au village de Le Coq en passant par la plage : du sable à perte de vue, un moment de pure méditation, les oreilles fouettées par le vent avec pour récompense, une gaufre bien charnue à l’arrivée.






On pousse (en tram cette fois) jusqu’au port marchand de Zeebruges. Si le temps le permet, on termine à pied, à travers les portes containers, jusqu’à Knokke-Heist, la plus connue des stations belges. Si faire les boutiques vous intéresse c’est probablement une bonne escale. Pour le reste, ses voisines n’ont vraiment rien à envier à Knokke qui nous a semblé un peu moins authentique.
Où manger
À Zeebruges : au milieu du port industriel de Zeebruges, on déjeune des croquettes de crevettes ou un bon fish and chips à ‘t Werftje.
À Ostende :
Pour le petit déjeuner, rendez-vous au Café du Parc. Pour son ambiance art déco, ses grandes fenêtres d’où l’on peut observer la ville se réveiller. Mais aussi pour découvrir le pistolet, un petit pain rond et fendu d’un léger sillon au sommet, en version sucrée ou salée.
Rocco Eats Foodbar : on s’installe au Bar pour déguster ce qui reste pour le moment la meilleure pizza de notre vie ! Un restaurant aux accents italiens qui n’oublie pas de faire honneur aux produits de la mer toute proche.
The Catch : bar à fruits de mer et cocktails tenu par deux frères. L’un en cuisine et l’autre en salle. Un endroit cosy avec des produits frais préparés à la minute. Un must !
À Le Coq : Le Coq - Glaces maison, pour une glace mais aussi pour une vraie gaufre liégeoise avec de gros morceaux de sucre. Un délice.
À Knokke-le-Zoute :
Glacier de la poste : C’est une institution. Niché au cœur de Knokke, le Glacier de la Poste ne paie pas de mine, mais sa file d’attente en dit long.
Marie Siska : parc d’attractions pour enfants d’un côté, gaufre monumentale de l’autre, vaisselle immaculée, serveurs guindés et verre de vin d’Américain à la main. Tout est un peu trop, mais parfaitement assumé et, il faut l’avouer, délicieusement régressif.
Où dormir
On a posé nos valises au tout nouveau The Ostendian, ouvert en mars 2025. Chaque chambre porte le nom d’un héros de la ville : natifs ou adoptés, ils brillent dans la musique, l’art, le cinéma, le sport, la science et bien plus encore.
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