Gavarnie hors du monde
On ne sait plus très bien d’où lui est venu l’idée. Peut-être juste cette envie de silence plus forte que celle d’avoir chaud. Départ pour Gavarnie-Gèdre. En mars. Autant dire hors-saison.
On a planté notre camp dans une drôle de maison à toit pointu, suspendue à flanc de montagne, comme un rêve d’enfant ou un caprice d’architecte un peu bohème. Elle s’appelle La Maison suspendue – pour une fois, le nom dit tout. Vue imprenable sur la vallée.
À l’intérieur, tout est doux : la lumière, les livres, les murs en bois, les plaids bien choisis. Une baignoire, lovée sous les toits, brûlante face à la forêt. Un bain pas très écolo, mais une fois dedans, tout est oublié : le monde, le froid, les mails, le reste.
Dehors, le décor : un village figé dans une sorte de longue pause. Tout est là, mais rien ne bouge. Ruelles vides, hôtels et restos fermés, rideaux tirés, comme si le son avait été coupé. Un Shining version pyrénéenne. La saison s’était volatilisée avec les derniers skieurs autour du 16 mars. On est arrivés juste après. Trop tôt pour le printemps, trop tard pour le reste. Il ne restait que nous et la tempête avec ce sentiment étrange de vivre dans un décor sans figurant.
Alors, on est restés. À lire, à jouer, à regarder tomber la neige depuis le velux. On a pioché dans les beaux livres d’enfants laissés là par les propriétaires, feuilleté à la loupe les atlas de montagnes, les herbiers d’altitude, les récits d’ascension. Le monde extérieur pouvait bien tourner sans nous.









Puis le ciel s’est éclairci. On s’est demandé par où commencer, tant chaque sentier semblait promettre une carte postale. Décidés, on a emprunté ceux barrés. Fermés, disaient-ils. On a enjambé une coulée d’avalanche pour atteindre l’Hôtel du Cirque et de la Cascade. Fermé lui aussi, évidemment. Il ne rouvrira qu’avec les fleurs et les ponts de mai. Tant mieux, presque. Il avait encore plus de charme les volets clos, la cascade pour seule bande-son.
Partout dans la vallée, l’eau dessine le paysage. Des lacs (naturels ou formés par les barrages), translucides comme du verre. Des torrents, des cascades, des stalactites qui fondent lentement, comme dans un Disney qui sent l’arrivée du printemps. On est bercés par l’eau, par le silence, par l’idée douce que tout est à sa place.
Au bout de deux jours sans croiser âme qui vive, entre neige fondue et ciel bleu franc, un truc étrange s’est installé. Le calme. Le vrai. Celui qui fait peur au début, et qu’on apprend finalement à chérir. Celui qu’on ne trouve plus dans nos vies pleines.
On est repartis changés. Un peu réparés.
Où dormir :
La Maison Suspendue : Un cocon accroché à la montagne, baigné de bois blond et de lumière.
La maison Refuge (même propriétaire) : Nichée à 1 300 mètres d’altitude, entre design sobre et feu de bois, pour ceux qui aiment s’isoler sans renoncer au beau.
Hôtel du Cirque et de la Cascade (quand le printemps revient) : Un refuge hors du temps face à l’amphithéâtre naturel de Gavarnie.
Où manger :
Dans son cocon, hors saison. On n’a pas testé alors on ne peut se prononcer.
Où partir marcher :
Le cirque de Gavarnie reste une évidence. Même désert, même glacé, il garde ce pouvoir magnétique. Une muraille naturelle qui surgit au bout du chemin, comme un décor trop parfait pour être vrai. Mais vide, silencieux, il impressionne encore plus. Presque sacré.
Les barrages : celui d’Ossoue, au bout d’une vallée longue et silencieuse, débouche sur un lac encore figé dans une lumière pâle. Et les Gloriettes, plus doux, plus accessible. Les pentes mouchetées de neige se jettent dans le lac turquoise.
On nous a aussi parlé du cirque de Troumouse et du plateau de Bellevue. Nous reviendrons c’est certain.