Haarlem, la douce échappée
Sur le papier, Haarlem, située à une trentaine de minutes de la capitale néerlandaise, pourrait passer pour la petite sœur d’Amsterdam. De jolis canaux, des vélos et des grands parcs.
Au contraire, Haarlem c’est l’anti-Amsterdam. Alors que la grande ville semble suffoquer sous l’effet du tourisme de masse et des odeurs de coffeeshop (pas ceux qui vendent du café), Haarlem, la bourgeoise, respire l’art de vivre hollandais.
Aux Pays-Bas, on ne parle pas de “hygge” mais de “niksen”, cet art de ne rien faire dont les hollandais semblent très fiers et que certains qualifient même d’oisiveté décomplexée.
Pas ou presque pas de bâtiment de plus de deux ou trois étages. Les seuils d’entrée sont tous fleuris et même lorsque les voisins n’ont manifestement pas le même sens de l’esthétisme, le bric-à-brac de pots de terre crée un subtil mélange de couleurs et de matières. De jolies fenêtres quadrillées dévoilent des intérieurs cosy. On devine parfois de grandes baies vitrées ouvertes sur un petit jardin à l’arrière qui nous feraient presque décocher la case “éviter les rez-de-chaussée” sur SeLoger.com. Les ruelles pavées aux façades de briquettes font cohabiter églises médiévales et concept stores branchés. Les chats promènent paisiblement leurs bedaines d’un coin de rue à l’autre, avant de rejoindre les canapés design de leurs maîtres.








Haarlem a ce petit côté “posh” qu’on aime chez nos copines. Un naturel snob mais sincère à la fois. Historiquement, Haarlem a construit sa prospérité sur ses fonderies, son industrie textile et la construction navale. Une banlieue chic qui cache toutefois un des pays les plus densément peuplés d’Europe dans lequel les débats politiques d’aujourd’hui sont identiques à ceux qui occupent les médias français.
Difficile pourtant, avec notre œil de city-breaker, de ressentir ce manque d’espace. La nature semble au contraire omniprésente et ce sont des ruelles paisibles qu’on arpente le temps d’un weekend.
À Haarlem, on apprend à prendre le temps, à se déconnecter des réseaux et des écrans pour lever les yeux au ciel et pédaler jusqu’à la Mer du Nord, à dix kilomètres de là. Haarlem a en effet bien plus à offrir que son seul centre ville historique.
En dehors des parcs, Haarlem expose une parfaite toile de fond : une forêt boisée qui la borde à l’ouest, des champs de tulipes et de jacinthes au Sud, une réserve naturelle et des dunes de sable comme barrières naturelles aux vents et aux assauts de la mer du Nord.
Plutôt que de faire simple et de rejoindre directement les embruns par la piste la plus courte, nous choisissons de parcourir la campagne hollandaise (pas si plate) et ses clichés : sur quarante kilomètres aller-retour (merci à celui qui n’a pas voulu prendre d’assistance électrique), nous empruntons des pont-levis pour enjamber les canaux, lorsqu’aucun pont n’a été construit nous traversons l’eau en petit bac, traversons forêts et bois avant de sourire bêtement aux canards et autres vaches laitières qui nous regardent passer.
Des moulins jalonnent la campagne batave. De grandes fermes aux portes rouges défilent, alternant avec les maisons traditionnelles posées entre deux canaux face à de grandes étendues de verdure. Du vert partout. Y compris sur les terrains synthétiques de hockey sur gazon. Le weekend, les coups de crosse se font entendre à des dizaines de mètres et attirent les curieux au milieu de parents survoltés.
Pour ne pas se perdre, on suit attentivement les numéros du sentier cyclable. Chaque itinéraire est constitué de point-étapes numérotés qui sont parfaitement indiqués à chaque bifurcation. Un vrai jeu de piste avec comme objectif final une première baignade dans les eaux de la Mer du Nord.
L’ambiance et l’architecture de la station balnéaire de Zandvoort, qui accueille également un circuit de Formule 1 en pleine ville, vous rappellent très vite qu’on est sur les côtes du Nord. Pas de sable blanc, pas d’eau turquoise. Mais de grandes étendues de sable balayées par les marées et les vents. Une architecture brute, un peu désuète. Une sorte de Cabourg dunkerquois, avec baraques à frites ambulantes tirées par des tracteurs sur la plage. Au loin, en pleine mer, les champs d’éoliennes masquent les côtes anglaises et regardent passer les porte-conteneurs qui arrivent sur le Port d’Amsterdam, à quelques encablures.
Quelques kilomètres plus loin, la station de Bloemendaal aan Zee frôle les pâturages dunaires du Kennemerland National Park. Les bisons d’Europe y vivent au milieu des dunes façonnées par la houle et l’érosion. Au bout de chemins ensablés, jonchés de vélos, on se baigne dans des petits lacs où les locaux viennent fêter les anniversaires comme on installerait banderoles et ballons au Jardin des Tuileries. Dans cette zone, les dunes ne sont pas seulement contemplatives et permettent en réalité de purifier l’eau d’Amsterdam au moyen de canaux et de puits. Est-ce que finalement ce n’est pas aussi ça l’art de vivre hollandais : joindre l’utile à l’agréable ?
A trois heures trente de Paris, cette escapade hors du temps, sauf celui d’un week-end qu’on souhaiterait plus long encore, a en tout cas la saveur d’une douce échappée, loin du peloton Amstellodamois.
Où dormir
Boutique Hotel Staats : près de la gare, idéal pour une arrivée tardive le vendredi soir. Un coup d’Eurostar et un TER local plus tard, vous êtes déjà arrivés.
Où manger
Jules coffee & concept : ouvert par deux passionnés de mode et de café, Jules et Linda. C’est devenu notre repère du weekend pour le petit déjeuner comme pour le goûter, au bord de la Spaarne où défilent voiliers et autres coques, au rythme hypnotique des ponts levants. Une boulangerie a également ouvert cette année à une rue de là, Jules Bakery.
Fishbar Monk - Visrestaurant Haarlem : bar à poissons. Tous les plats sont faits pour être partagés. Nous recommandons particulièrement les coques à la nduja et les spaghettis aux fruits de mer ! Un régal après une journée à pédaler !
DeDAKKAS : rooftop posé sur un parking de six étages en plein centre ville sur lequel a été apposée une jolie verrière pour les jours plus frileux. L’endroit parfait pour profiter d’un verre au coucher du soleil et d’une vue privilégiée sur la ville.
Native Haarlem - Koffie : niché dans un des plus jolis quartiers de Haarlem, idéal pour prendre un café ou déjeuner sur le pouce au calme dans une ruelle fleurie. Vous ne serez dérangés que par le chat des voisins qui a fait du banc ensoleillé son spot de sieste.
Brick : située dans le quartier de Vijfhoek, notre préféré. Brick est un restaurant français considéré comme l'un des meilleurs restaurants gastronomiques de la ville. Dans une ambiance informelle, les poussettes côtoient les célibataires les plus en vue.
Republiek Bloemendaal à Bloemendaal aan Zee, une station balnéaire plus huppée et située juste après Zandvoort en remontant vers le nord. Il est fortement conseillé de réserver les jours ensoleillés.
Fun fact :
Haarlem et non Harlem. La première a donné son nom à la seconde. Harlem, la new-yorkaise, a en effet été fondée en 1658 par un néerlandais. D’abord baptisée Nieuw Haarlem, en hommage à la ville de Haarlem, le nom Harlem a été adopté en 1664, lorsque les Britanniques ont pris le contrôle de New York.